Ma classe a sa place
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Qu’est-ce qu’une place ?

« La place est un lieu public découvert, généralement entouré de constructions, desservi par des voies de circulation. Le mot est issu du latin « platea » qui signifie « Rue large » et désigne effectivement un espace découvert plus large que la rue, dont il apparaît comme un complément fonctionnel indispensable dans l’espace public des villes » (1)
Aujourd’hui, qu’il s’agisse des grands ensembles ou des centres urbains, les places, par leur absence, leur dégradation ou, au contraire, leur rayonnement, sont des éléments essentiels du paysage urbain. Elles doivent être au cœur de débats dont l’enjeu concret est une certaine idée d’une ville qui se conçoit à nouveau à partir de ses espaces publics.
Composante essentielle du réseau des espaces publics et support de nombreuses fonctions urbaines, la place est desservie par des voies de communication, mais elle est à la fois notamment une composante de la mobilité, de l’économie de proximité, une respiration dans la ville, un espace de représentation et un lieu de convivialité.
L’agora d’Athènes apparue au 6ème siècle avant J.C était, avant que l’assemblée des citoyens ne se déplace sur le Styx, une place entourée d’institutions politiques, de bâtiments religieux ou de monuments où se déroulaient les échanges, les rencontres et où s'exprimait la vie sociale de la cité. Cette double caractéristique décor et mise en scène du pouvoir politique et religieux et fonction emblématique d’espace public, lieu de la citoyenneté s’est affirmée dans de nombreux pays européens à partir de la renaissance.
Pour Camillo Sitte, architecte viennois du XIX siècle (2), qui a étudié ces espaces à partir d’analyses du Forum romain et des places anciennes de plusieurs villes européennes :
- La place est le lieu d’une ouverture-fermeture dont la forme est déterminée en vue de l’effet qu’il peut produire pour le regard du citadin et non un espace public résiduel faute de n’avoir pu être bâti. La place adopte une composition et un ordonnancement propre à chaque contexte urbain selon des règles établies par l’usage.
- Son lien avec la vie publique est historique : si autrefois une grande partie de la vie publique se déroulait sur la place elle demeure encore le lieu des manifestations
- Lieu de rencontres, d’échanges, la place qui accueille les boutiques des commerçants et le marché, les jeux des jeunes, la promenade et qui est traversée par les habitants qui vont prendre leur bus ou leur métro, exprime la vie commune au quotidien.
Selon Giuseppe Bonacorsi, Architecte Urbaniste (3) « Aujourd’hui, les espaces publics sont soumis à deux formes majeures d’exclusion : l’exclusion sociale, qui laisse à l’abandon les espaces publics des quartiers pauvres et périphériques et l’exclusion fonctionnelle qui réserve essentiellement ceux-ci à l’usage des véhicules. » Dans les centres urbains si beaucoup de places ont, de ce fait, été envahies par la circulation et le stationnement des voitures, on assiste depuis un peu plus de 30 ans à une prise en considération de ces sites qu’il s’agisse des places du marché, des places d’armes, des grand ’places, des places royales ou tout simplement de la place de quartier ou du village. Cette évolution qui a concerné de nombreuses villes qui ont réaménagé ou requalifié leurs places est liée, d’une part, à une attente des habitants en ce qui concerne la qualité urbaine et à une volonté de bénéficier d’un bien-être au quotidien et, d’autre part, à la possibilité pour les élus d’agir rapidement sur des lieux libres de construction pendant la durée de leur mandat.
Un nouveau contexte climatique
L’accélération du réchauffement climatique doit nous alerter sur la détérioration des conditions de la pratique de l’espace public, « la rue à 50° », dont l’occurrence est de plus en plus proche. Il sera de moins en moins agréable de s’arrêter quelques minutes sur un banc pour lire un journal ou pour surveiller un enfant qui joue dans un bac à sable. Toutefois, nous avons un outil auquel nous pouvons recourir pour lutter contre le réchauffement : l’arbre dont la présence est très efficace pour faire baisser la température, ombrage et évaporation. Planter ou replanter une place où l’espace a été colonisé par le stationnement automobile est une valorisation essentielle qui peut être complétée par l’utilisation du bois et de l’herbe dans les villages et les bourgs.A partir de ces constats les objectifs pourraient être en ce qui concerne les places :
- De faire comprendre que certains espaces publics de la ville constituent un patrimoine de grande valeur pour leur forme et leurs qualités architecturales, mais aussi comme espace de vie porteur de cohésion sociale.
- De profiter des respirations dans la ville que constituent les places, préfigurer un réseau d’espaces plantés nécessaires à la lutte contre le changement climatique en prenant appui sur ces espaces publics majeurs
- De retrouver pendant une période déterminée les formes oubliées de nos places et de sensibiliser les habitants jeunes et adultes à l’intérêt d’une utilisation différente de celles-ci.
Les initiatives et thématiques possibles
1 - Profiter de l’occasion pour faire en amont une enquête par des élèves auprès des habitants pour connaître leur opinion sur les places qu’ils connaissent dans leur quartier et leurs attentes éventuelles2 - Préparer « Ma classe a sa place » en amont avec leurs enseignants pour choisir une place et dans le cadre d’un parrainage, peu à peu, lors de visites exploratoires à différentes saisons apprendre à définir sa forme, son histoire, son positionnement dans l’espace public, son organisation, ses atouts, ses faiblesses, ses usages actuels et potentiels, afin de saisir l’importance de prendre soin des places compte tenu des enjeux qu’elles représentent pour la ville de demain.
L’idée est de créer une relation avec un espace public permettant aux élèves et à leurs enseignants de saisir ses qualités et ses défauts, de les mettre en débat et ainsi de faciliter une appropriation collective originale.
3 - Faire un diagnostic de certaines places au regard de l’accueil qu’elles réservent au jeu des enfants, à la végétalisation et à la biodiversité et imaginer une configuration plus favorable à ces éléments en tenant compte d’une reconquête possible de certains espaces de stationnement.
4 - Proposer, sur une place de quartier qui serait pertinente au regard de la sécurité et de l’espace disponible, d’organiser à l’occasion d’un rendez-vous de quartier une « classe dehors » pendant une heure et demie au cours de laquelle les élèves raconteraient sous différentes formes (dessins, photos, vidéo, chanson, poésie, récit enregistré) « leur » place aux habitants.
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Références
(1) Le lexique de la ville Jean-Philippe ANTONI, Editions Ellipses 2009(2) L’art de bâtir les villes Camillo SITTE, Points Essais Editions du Seuil
Éloge de la place. Camillo Sitte ou l’agoraphilie, La ville inquiète, Le temps de la réflexion, VIII, Gallimard, Paris, 1987
(3) Dossier « Les places publiques » Autres vues CAUE du Nord, 1995
Changer la place du village en ville Editions Archibooks Alain BOURDIN 2023
Quand la place devient publique Editions Le bord de l’eau Joelle ZASK 2018
La place dans le « Dicorue » Thierry PAQUOT Page 348 ,Editions du CNRS 2017
Espèces d’espaces Editions Galilée Georges PEREC 1985
Les places dans la ville Les pratiques de l’espace M.J.BERTRAND H.LISTOWSKI Dunod Editeur 1984
En savoir plus : La rue, la place le quartier » Site Rue de l’Avenir
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